Alexandre et les fleuves

Dominique D'Almeida, Nathalie Cros

Résumé


Tous les grands chefs et héros militaires ont eu leur(s) fleuve(s): César et le Rubicon, Louis XIV et le Rhin, Napoléon et le Danube, le Niemen ou même la Bérésina… Le fleuve est toujours associé à un moment capital de la guerre ou de la conquête, et il constitue une clé d’une lecture héroïque. La première raison en est, bien sûr, que le fleuve est une donnée réelle à prendre en compte, un obstacle concret qui se présente, une occasion de danger. Mais ces données ont immédiatement une dimension imaginaire, dont on peut distinguer deux motifs: celui de la limite tout d’abord, dont le franchissement prend différentes significations symboliques, investiture royale, épreuve initiatique, dépassement de la condition humaine… Le second motif est plus directement lié au thème de notre journée, «l’imaginaire de l’eau»: c’est celui du courant impétueux, de la force ou de la violence, que le héros doit affronter et à laquelle il se mesure, comme à un adversaire à sa taille. Nous voudrions montrer, en confrontant certaines sources latines et grecques, comment l’élaboration de la figure légendaire d’Alexandre fait une place significative au fleuve. Pour cela nous avons procédé à une lecture comparative des récits historiques qui nous sont parvenus, et qui utilisent les sources premières aujourd’hui perdues: le récit de Diodore de Sicile, la biographie de Plutarque, l’Anabase d’Alexandre le Grand d’Arrien, et l'Histoire d’Alexandre de Quinte-Curce. C’est chez ces deux derniers auteurs que la mention des fleuves est, et de très loin, la plus importante. Quinte-Curce écrit à une époque où la légende d’Alexandre est déjà constituée et où l’imitatio Alexandri est entrée depuis bien longtemps dans les habitudes des grands hommes de guerre. Arrien, tout en suivant Ptolémée comme source principale, dont Goukowski (1978-1981) dit qu’il «écrit l’histoire aseptisée d’un conquérant sans faiblesse», veut être l’Homère du nouvel Achille qu’est Alexandre. On se propose d’étudier, à travers la typologie des fleuves, comment l’écriture dramatise les épisodes fluviaux et constitue en héros le personnage du conquérant.

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Références


Goukowsky, Paul (1978-1981), Essai sur les origines du mythe d’Alexandre, 2 t., Nancy. Leclant, Jean (2005), Dictionnaire de l᾿Antiquité, Paris: Presses Universitaires de France.


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