L'imaginaire du marais chez Apollonios de Rhodes et Quintus de Smyrne

Sophie Lécole, Laury-Nuria André

Résumé


Pour peu que l'on s'intéresse à l'histoire de la sensibilité paysagère, on remarque que le marais semble être victime, de la part de l'époque moderne qui en configure la réception, d'un rejet quasiment unanime. Toutefois, malgré cette répulsion, nous avons pu observer des concrétions plus singulières, des propositions, littéraires et artistiques, peut-être minorées, qui permettent de nuancer le statut de locus horridus attribué au marais, et de relire cet espace à la lumière de configurations positives.

Ces figures autres, nous les avons rencontrées aussi bien dans la littérature antique de l'époque hellénistique, que dans la peinture paysagère du XVIIe siècle, ou encore dans le cinéma contemporain. Si elles semblent former un intertexte, il n'est pas évident pour autant qu'elles soient des résurgences les unes des autres. Toutefois, ce qu'elles ne laissent pas de désigner, ce sont d'autres enjeux de sens pour le marais, des enjeux finalement très contemporains, très différents aussi de ceux que l'époque moderne assigne aux marais. Ce sont ces enjeux que nous allons tâcher de faire émerger.

De ce croisement de figures et de réappropriations que nous allons mettre au jour, apparaît aussi l'idée que le marais pourrait être une figure du Neutre, selon la compréhension du terme que construisit, jadis, Roland Barthes. À la fois terre et mer, humide et sec, liquide et solide, le marais apparaît comme un tertium quid, un «troisième terme» traversant ces catégories, et ce faisant, déjouant la frontalité de leurs oppositions. Il apparaît en ce sens comme espace à même de penser l'inassignable. Dans cette perspective, il ne sera pas surprenant de constater que son exploitation tant poétique qu'artistique va souvent se faire le relais d'une interrogation sur la construction identitaire.


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